Edouard CABANE --- « Portrait de mes parents »

Analyse iconographique
- Pour ce témoignage de piété filiale, l’artiste emprunte le réalisme photographique cher aux portraitistes académiques et à son propre maître, William Bouguereau.
- L’œuvre apparaît construite sur une juxtaposition pyramidale des personnages, jouant sur les contrastes : lui, debout, de face, dans une pose déhanchée, les mains fermement posées ou appuyées ; elle, assise, de trois-quarts, en posture stable, les mains inertes, jointes en une molle étreinte sur le devant du corps.
- La médiane verticale place l’homme, la diagonale place la femme. Les deux diagonales désignent la main droite de l’homme. Le rabat de la largeur sur la longueur du tableau laisse la partie inférieure de la peinture à la femme.
- Le même contraste formel se retrouve dans la lecture des expressions physionomiques. Le vaste front de l’homme s’oppose à celui de son épouse, habillé par les bandeaux de la chevelure ; à son regard scrutateur, enfoncé au creux de l’orbite, répond une paupière mi-baissée sur un regard plutôt éteint, la bouche, invisible dans la barbe, se devine cependant fermée et sérieuse, sans comparaison avec le léger étirement d’un demi-sourire.
- Description soignée des vêtements, geste souple de la femme, attitude plus dynamique de l’homme debout déhanché, main sur le côté. La femme assise, est dominée par l’homme. C’est un couple qui appartient à un niveau social plutôt aisé. Les courbes des bras semblent unir les deux personnages.
- Le seul élément fédérateur est constitué par l’adoption commune du vêtement noir, dont la sévérité est rachetée par la qualité de l’étoffe et de la coupe.
Quoi en penser ? Tout désigne un homme qui, malgré son âge, a encore sa place dans la cité ; il a des mains prêtes à l’action, la posture d’un homme assuré de sa force, un regard de commandement, une volonté affirmée de jouer encore un rôle sur la scène politique, sociale ou simplement familiale.
Tranchant sur cette image énergique, la molle figure féminine est renvoyée à une existence supposée oisive : son visage plein, de notable aisée, n’exprime que la soumission, le bienveillant renoncement ; épouse et mère, il semble qu’il ne lui reste plus maintenant qu’à vieillir en paix, respectée et retirée dans l’intimité de son foyer.